HipHop sans frontières

[Chronique] Axis - Mille Excuses

01. Mille excuses
02. L’envers du décor (Ft. BLOOZ)
03. Contes & légendes (Ft. Cyanure)
04. Comme un vide (Ft. Deadi & Kroksy)
05. Game Over (Ft. Le Jouage)

Localisation : Paris, France

Année : 2024

"Pour ce nouvel album, Axis creuse encore plus profond, explorant les contrastes de la vie urbaine, les combats internes et l'importance de rester authentique à soi-même. Les auditeurs peuvent s'attendre à un mélange de rythmes entraînants, de paroles poignantes et d'un flow inimitable qui a solidifié sa place dans le paysage du rap français.

Avec une carrière qui s'étend sur plusieurs décennies, Axis a été témoin de l'évolution du rap, et a lui-même joué un rôle majeur dans la définition de sa sonorité. Son expérience en tant que membre d'ATK lui a donné une perspective unique sur l'industrie, lui permettant de jouer avec les normes tout en restant fidèle à ses racines.

Les thèmes abordés dans ce troisième album sont plus introspectifs. Axis examine ses propres démons, ses triomphes, et ce que signifie grandir dans une culture en constante évolution. Chaque piste est une histoire, un morceau de son âme qu'il partage généreusement avec ses fans.
Alors que ses albums précédents ont marqué des étapes significatives de sa carrière solo, ce troisième opus semble être le point culminant de ses expériences, ses défis et ses réussites. C'est une célébration de la persévérance, de l'art et, surtout, de la musique qui résonne dans nos cœurs et nos esprits.

*Axis invite le monde à rejoindre son voyage, à écouter et à ressentir chaque mot, chaque note, et à se perdre dans le rythme de sa passion. Préparez-vous pour une autre œuvre magistrale qui ne manquera pas de laisser une empreinte indélébile sur la scène rap française.* "

Citation extraite du Bandcamp officiel d’Axis. Globalement, tout est dit si l’on veut résumer rapidement ce nouvel EP. On va revenir sur son parcours et ses précédents projets, car c’est quelque chose qu’on avait prévu de faire depuis un moment. On a déjà beaucoup parlé d’ATK via nos chroniques, donc on ne va pas revenir sur le groupe dans cet article. Axis a refait parler de lui en tant qu’artiste solo en mai 2015 avec la sortie du maxi « Avoue Que Tu Kiffes / Addiction ». On y retrouve également Tacteel et Test de son groupe. Deux très bons morceaux qui avaient touché les nostalgiques et les vrais fans de rap. Après, il est reparti en silence radio (en solo) avant de nous gratifier de son album ‘Avoue que tu kiffes part 2′ . 10 titres avec des feats de Blooz, Reeno (Ul’Team Atom), Cyanure (ATK) et Ydeal. C’était l’occasion de découvrir « Me parlez pas d’amour », « Crash », Bonne étoile » et d’autres morceaux très intéressants. On y trouve également un morceau instrumental nommé « Le fils de l’empereur ». Axis y compose quasiment l’intégralité du projet et les thèmes sont assez variés et toujours parlants.

Profitant de son excellente lancée, il décide de récidiver plus rapidement avec « Mille excuses ». En effet, il y a exactement un an d’écart entre les deux projets. Le projet est mis en avant par l’artiste lui-même et également son crew ATK. Très proche de son public et de ses fans, ils ont grandement œuvré à la promotion de l’album. Ce qui a suscité beaucoup d’attentes et nourrit beaucoup de rumeurs également. L’EP est court, mais le format oblige, et l’essentiel est présent : la qualité. S’il est reconnu comme le grand architecte sonore de son crew, il est également renommé pour avoir contribué à l’essor d’un style. Adepte des samples bruts, c’est-à-dire sans trop les découper, sélectionné la partie qui l’intéresse sans trop la dénaturer. Il fait logiquement partie de cette grande école du rap français qui s’est inspirée des légendes du Queensbridge. Il a évidemment bien évolué depuis 1996 et a su élargir sa palette musicale. On retrouve sur cet EP, différents artistes qui ont participé en jouant de la basse ou de la guitare ou qui ont coopéré aux enregistrements, aux arrangements et aux mixs. Citons Max Elbling, Paul Scemama, SOLOKO, Manny

Pour les featurings, on retrouve de nouveau Blooz sur « L’envers du décor » qui fait honneur à son nom encore une fois. L’autre feat important, logiquement attendu, et annoncé est celui de Cyanure sur « Contes & Légendes ». Le titre raconte l’histoire de l’album de Cyanure. C’est le seul artiste du groupe à n’avoir jamais rien sorti en solo, c’est étonnant. D’une part, car il est souvent considéré comme le ou l’un des meilleurs du groupe, d’autre part, car il a travaillé à un moment donné sur un album solo. Or, il faut constater qu’il n’a jamais vu le jour, et quand on repense à « 20 ans », on se dit qu’un solo de cet acabit serait forcément un classique. En fait, on comprend qu’il avait d’autres priorités et comme il dit dans l’échange de bons procédés… Il préfère honorer des featurings et des collaborations au lieu de travailler sur son propre album. C’est louable d’un côté, mais dommage pour sa carrière et son prestige, il est tellement apprécié dans le rap qu’il pourrait vraiment collaborer avec qui il veut. On repart pour un tour et on continue d’attendre…

« Comme un vide » fait appel au rappeur Krosky qui livre une excellente prestation et à Deadi qu’on connaît mieux. Ce dernier, fidèle à lui-même apporte une touche de folie avant de conclure cet EP. Le dernier morceau « Game Over » est une ode au passé, la nostalgie qui anime si bien Axis. Un titre qui reflète bien le jeu de mot avec le titre, car on y trouve un son qui semble tiré d’un jeu vidéo. Le dernier feat est Le Jouage (Gravité Zéro, Hustla, Le Klub Des 7, Olympe Mountain) qu’on prend plaisir à réécouter.

À l’arrivée, on se retrouve avec un EP solide qui reflète assez bien l’artiste. C’est-à-dire, un artiste avec son propre univers, sans fioriture et terre-à-terre. Il y a des références au passé, mais toujours bien senties. Il est dans sa nature d’être nostalgique et d’avoir un penchant vers tout ce qui s’apparente à de la mélancolie. Néanmoins, c’est beaucoup moins visible sur la production de ce projet, ce qui lui donne une autre saveur. L’autre point identifiable chez Axis est son franc-parler, ses textes sont pleins d’anecdotes, légères et toujours bien racontées. L’écriture va droit au but, on n’est pas sur un concours de rime, une compétition de flow ou un one-man-show. Ce qui en fait également une force, sa voix est facilement reconnaissable, il s’exprime clairement et il se démarque rapidement des autres rappeurs.

Enfin, le dernier point que je souhaite relever, c’est son côté réaliste voir fataliste par moment. Disons plutôt sa sagesse et son ouverture d’esprit, il traite très bien des sujets de la société, de la condition humaine et de sa propre vie. C’est très intéressant à écouter, car on peut vite s’y retrouver et adhérer ou réfléchir à ce qu’il relate. C’est la vision d’un homme qui a grandi dans une société qui a profondément changé, il s’est adapté et a traversé plusieurs décennies. Adulé par les fans et ceux qui l’ont connus à sa grande époque, mais rattrapé par la vie de tous les jours qui le pousse à gagner sa vie autrement qu’avec la musique. Il faut savoir que sa musique est entièrement gratuite, ce qui en fait une très belle démarche pour un artiste indépendant et qui y consacre beaucoup de temps. Il met fin également à un mythe qui veut que ce qui est gratuit (dans l’art en particulier) est de moins bonne qualité ou bâclé. Ceux et celles qui ont écoutes, avouez que vous kiffer !

Rédigé par Fathis