1. Les derniers seront les premiers feat Prestone (Prod Mysa)
2. Chansonnette (Prod Mysa)
3. Dans le sale (Prod Mysa)
4. Sarbacane (Prod Kaioken)
5. Révolu (Prod El Gaouli)
6. Le dôme de verre (Prod Mysa)
7. Un indien dans la ville (Prod Mysa)
8. La 6ème lettre (Prod El Gaouli)
9. Miroir feat. Akhenaton Prod (Prod El Gaouli) – Piano : Patrice Kornheiser
10. Qu’est-ce qui fait vriller le monde (Prod Kaioken)
11. Road trip (Prod Mysa)
12. Bouteille à la mer (Prod Mysa / El Gaouli)
Disque 2 :
13. Comme un fou (Prod. Mani Deïz)
14. Affranchi Prod (Prod El Gaouli)
15. Le grand remplacement (Prod Mysa)
16. Le ralliement (Prod Odemes)
17. Dans un univers (Prod Mysa)
18. La marque de la bête (Prod Mysa)
19. Qu’est-ce qui fait vibrer le monde feat. Prestone (Prod Mysa / El Gaouli)
20. Pèlerinage (Prod Mysa)
21. D’accord (Prod Mysa)
22. Le mien en paix (Prod Mysa)
23. Autopsy (Prod Mysa)
24. Gratitude feat. DJ Rolxx (Prod Mysa)
Nous sommes en 2025 et nous allons évoquer le dernier opus de Mysa, l’artiste originaire de Metz qui s’est imposé comme un pilier du rap français. Il est important de noter qu’il est en activité depuis plusieurs décennies à présent. Le premier opus de l’artiste, intitulé « Lyricisme, Actes Et Propagandes », a été publié en 2004. En 2005, il sort une mixtape nommée « Instant Classic ». En 2007, il sortira son deuxième album intitulé « Les poésies du chaos », accompagné de sa mixtape précédente en prime. On retrouve Al’Tarba et Demi Portion, avant même qu’ils ne soient largement reconnus. En 2009, il trouvera une résonance nationale grâce au projet « Enfermé Dehors, Jamais Libre ». Et ce succès est bien mérité avec des œuvres telles que « Le diable roule en Ferrari », « Ma communauté », « Les sentiers perdus », « Le monde est un barrio », « Embrasser ma vie » et bien d’autres. Par ailleurs, le projet était entièrement gratuit sur internet, ce qui a indubitablement favorisé sa propagation et sa notoriété. Finalement, en avril 2012, il publie la suite intitulée « Enfermé Dehors Jamais Libre Saison 2 » en collaboration avec des artistes de renom : R.E.D.K., Mokless (Scred Connexion), El Gaouli, Mkash…
Et ensuite, il n’a plus rien sorti en termes de LP ou de mixtapes. Il dévoilera, en revanche, des morceaux qui semblent aujourd’hui être de véritables classiques ! Au-delà de son indéniable réussite musicale, ce sont les paroles qui se distinguent par leur éloquence. Il cible toujours avec précision et ne se limite pas simplement à représenter son époque ou ce qu’on traverse, mais il fait référence au futur sombre qui guette le monde et ses résidents. Force est de constater qu’il a trop souvent raison. Je parle évidemment de morceaux tels que « Piqûre de rap » ou « Le sale boulot », qui sont des succès incontestables. Quant à moi, si je devais choisir un titre à écouter en boucle, je pencherais probablement pour « Boulevard des rêves brisés », tiré de son premier opus. Vincenzo Terranova a offert un beat impressionnant et Mysa y déverse un flow agrémenté de paroles qui ne laissent personne indifférent.
L’illustration de la couverture de l’album est très expressive en ce qui concerne le contenu de l’album. Et c’est d’autant plus saisissant si l’on examine ses projets antérieurs. Il y a une véritable approche graphique qui préfigure déjà le niveau d’exigence que Mysa s’est imposé pour la création de cet album. Il s’agit d’un crâne humain et de restes osseux éparpillés au milieu d’une poussière qui recouvre un sol désolé. Cela peut représenter l’extinction de l’humanité. En quelque sorte, étant donné que nous sommes l’espèce la plus débile de l’univers, si nous persistons dans nos habitudes actuelles, c’est précisément ce qui nous attend si rien ne change.
On remarque également un casque de réalité virtuelle. Il est fissuré et paraît inutilisable dans son état actuel. Cela pourrait suggérer que c’est l’univers virtuel et tout ce qu’il contient qui a conduit l’humanité à sa propre destruction. Ce qui est encore plus terrible, c’est qu’elle a elle-même fabriqué ce qui l’a conduit à sa perte ! Et à ce stade, je ne peux m’empêcher d’établir une comparaison avec le jeu vidéo : Horizon Zero Dawn, qui est sorti en 2017 sur PS4. L’histoire prend place dans un monde futuriste et post-apocalyptique où les machines et les robots s’efforcent de dominer la planète. Tout cela s’est produit parce que les humains ont finalement été surpassés par leurs propres inventions… Intriguant, non ? Aloy, l’héroïne du jeu, s’efforce de sauver la planète tout en cherchant à découvrir sa propre identité. Encore une fois, ne percevons-nous pas de résonance avec ce que certaines personnes traversent aujourd’hui ? Faisons preuve de créativité, on va leur dévoiler la réalité à travers des œuvres fictives ou culturelles ; et nous leur ferons croire à des mensonges dans le monde réel.
Pour finir, le dernier élément de la pochette et peut-être le plus crucial : une plante. Elle est petite, c’est sûr, mais elle a ici toute son importance. Elle véhicule de l’espoir et de la lumière dans un monde qui manque d’hospitalité. La vie persiste à s’établir en dépit des circonstances. Est-ce que cela implique que l’espoir est toujours possible malgré le tableau accablant qu’il présente tout au long du projet ? Ou cela signifie-t-il simplement que les êtres humains ne sont que de passage et que seule la nature perdurera ? On peut tout anéantir, y compris nous-mêmes, mais la Terre, quant à elle, est éternelle.
Il termine par apposer sa signature en bas à droite et change les teintes des lettres « rop » ; on peut ainsi lire dans le titre « Anthologie ». On peut aisément le considérer comme LE meilleur projet de Mysa et de manière indiscutable. Un amateur qui découvre cette analyse ne peut qu’être charmé par le souci du détail que cultive l’artiste messin.
Et puisque on parle de l’aspect extérieur et des détails, voyons qui à participer à ce projet. Sur les 24 titres :
En fin de compte, il n’a pas vraiment besoin d’autres personnes et se suffit presque à lui-même. C’est compréhensible, car très peu de personnes ont la possibilité de voyager dans la même classe que lui. Seuls ceux qui possèdent les passeports appropriés sont autorisés. Il convient de noter qu’il n’a pas publié de projet depuis 13 ans. Naturellement, l’attente était considérable et il n’a pas lésiné sur le contenu proposé. Il s’agit de 24 morceaux sans aucune interruption, ce qui est inhabituel de nos jours. Cela met également en évidence le fait qu’il avait beaucoup de choses à nous communiquer. L’album débute avec une production du rappeur lui-même, accompagnée par une guitare douce et mélodieuse sur le morceau « Les derniers sont les premiers ». Il est à noter que le refrain qu’il crée n’est pas rappé, mais plutôt chanté ou presque. Il est également enrichi par la présence d’une voix féminine pour lui conférer plus de profondeur, et c’est particulièrement frappant lors du dernier refrain qui est interprété a cappella. Ce type de refrain sera également présent dans d’autres morceaux de l’album, y compris « Miroir » en collaboration avec Akhenaton. C’est une connexion entre le triangle d’or, car en plus du rappeur marseillais, on retrouve El Gaouli à la production. Comme d’habitude, c’est magnifique, ça nous transporte et c’est idéalement conçu pour le projet ainsi que pour les artistes. À travers deux strophes, les artistes partagent une portion de leur existence et mettent en exergue certains instants clés de leur vie. Le titre se termine par un extrait de conversation tiré de l’anime « Albator ». Ce bref extrait est très parlant, un bel hommage à IAM.
En parlant de voyage, produit par les deux beatmakers précédemment cités. Ce morceau est un cri de vérité et d’actualité, mais surtout d’Histoire. Effectivement, l’extermination des Palestiniens a débuté bien antérieurement à ce que la plupart des médias nous suggèrent. Mysa adopte le point de vue d’un jeune garçon de 12 ans prénommé Ayoub. Il y décrit sa vie de tous les jours et le génocide actuel pratiqué par l’entité sioniste contre son peuple assiégé à Gaza. Il s’engage dans une pratique qu’il chérit particulièrement, celle du couplet unique, dépourvu de refrain, sans transition, uniquement des vers de rap. Comme il excelle dans ce domaine, le résultat est logiquement à la hauteur.
Et quand on connaît l’artiste, on est assez surpris en lisant le titre « Road trip ». En réalité, cela nous incite à l’évasion, à la l’escapade ou à un récit de voyage relatant des anecdotes dans des pays exotiques, mais ce n’est pas le cas. Il évoque sa vie et toute cette période passé loin du du micro. Il n’a pas pour autant cessé de travailler, il s’est renforcé et a tranquillement analyser tout ses rappeurs courir après le succès sur terre. Encore une fois, Il fait preuve d’originalité en employant sa propre voix pour le chant du refrain. Sur « Révolu », il offre aussi un refrain inédit, légèrement moins accentué vocalement, mais parfaitement en phase avec le nom de la chanson. Son flow a également progressé, avec des variations de rythme et des placements très précis.
À l’instar du titre « Le ralliement », les morceaux sont essentiellement constitués de deux couplets et deux refrains. C’est une approche plutôt courante pour un artiste solo de nos jours. Il dispose de tout le talent nécessaire pour nous captiver, car les morceaux se succèdent sans jamais se ressembler. Tous ses textes sont parfaitement écrits, on peut facilement les parcourir comme un livre et y apprendre au moins une chose. Il ne s’agit pas simplement de poésie qui incite à l’élévation de l’esprit, mais également d’un soupçon de musicalité et d’énergie positive qui confère à l’ensemble une harmonie et un agrément indéniables.
Ce n’est pas un disque de consommation, conçu pour la radio et les écoutes rapides. Non, il est nécessaire d’avoir de la patience et de la concentration. Chaque titre doit être repassé, réécouté et relu afin d’en saisir complètement la signification. C’est une véritable œuvre artistique, un authentique travail de MC. En effet, la musique a le pouvoir de divertir, mais si elle peut également servir d’outil éducatif, c’est encore mieux ! Particulièrement aujourd’hui, où les œuvres musicales et culturelles sont dépouillées de leur essence, elles ne procurent même plus le divertissement qu’elles étaient supposées nous donner. Avec Mysa, tout s’assemble harmonieusement, ou comment allier l’utile à l’agréable ? L’éducatif et le divertissement ?
Le temps n’a pas eu d’impact sur lui, au contraire, il revient même avec plus de force. Lors de notre dernier concert, j’en ai discuté avec Romain DCZ. De nombreux artistes des années 90/2000 essaient de faire un come-back retentissant ces dernières années. Il arrive fréquemment qu’ils aient du mal à persuader les jeunes et que la nostalgie ne touche pas systématiquement les plus âgés. Mysa, en se fiant uniquement à lui-même et en évitant de chercher l’approbation des nouveaux comme des anciens, il parvient à faire consensus auprès de tous.
Et vous, quel est votre avis là-dessus ?
"Leur rap est sans âme, compatible à l'IA, ils créent des semblables aux esprits malléables
Parole primitive comme un cri animal, faire l'éloge d'un mode de vie qui nous a mis mal"
"Le monde changera pas à coups de gentilles phrases
Je vais marquer les hommes comme le temps qui passe"
"Pendant qu'ils prêchent la division, ils imposent des barrages ethniques
Ils rasent Gaza, ils diront que c'est un nettoyage éthique
Des enfants morts, des humains brûlés, des paraplégiques…
De l'Irak à l'Égypte, la guerre, c'est des mots ; les Arabes, des chiffres"
"On se demande même plus qui nous aime ou qui nous sauvera de ce piège
Génocide, c'est le seul mot qu'il faudra retenir de ce siège"
"Dans ton océan de certitude, t'aspire au bonheur
Tu crois remplacer l'amour de tes proches par des followers ?
"Les chroniqueurs, les journalistes remplacent les tribunaux
Tu vois pas qu'on t'échange une liberté au prix d'une autre ?"
"Tu parles aux masques égotiques je parle aux âmes émotives
Je les motive je leur envoie des notifs
Loin des pervers qui forcent pour rendre leur haine audible
Je me pose toujours une question que restera t-il après nos titres ?"
"Je voudrais parler à toutes et tous pendant que l'humanité s'égare
Parce qu'ouvrir ses bras, c'est bien mieux que rester sur ses gardes
On est des millions de lumières isolées qu'un mur sépare
L'évolution demande parfois de revenir sur ses pas
Pour un meilleur lendemain, y a rien de mieux que tendre la main
Le trésor de l'humain est dans son âme de gamin"