Belle découverte à travers cet EP, Bâle s’est fait remarqué dans la sphère Hip Hop ces derniers temps. En plus d’être une ville qui accueille un nombre conséquent d’artistes internationaux, elle possède également un grand vivier. Et le cru 2023/2024 s’est fait largement remarqué. La Suisse est un pays à part dans le monde, à bien des égards. La composante qui nous intéresse, est celle de la langue. Le pays est quasiment égal aux Pays-Bas en superficie, mais possède 4 langues officielles ! La première et la plus dominante est l’allemand, suivi du français (pas mal de Bâlois rappent ainsi), de l’italien (assez minoritaire) et enfin le romanche, parlé seulement dans un canton. Une diversité qui se retrouve dans son art, notamment le rap. Évidemment, on y trouve beaucoup de similitudes et d’influence venue de sa voisine française. Tout comme les influences allemandes qui s’abreuvent toutes à la même source. Pour le coup, c’est rappé en allemand et c’est très bien réalisé.
C’est suffisant pour ce duo qui s’est formé exclusivement pour ce projet. Snare, le beatmaker s’est crée une renommée internationale en composant pour divers projets incluant des pays comme la Grèce, la Russie ou l’Autriche. Ayant conquis l’Allemagne et la Suisse, il se tourne également vers les États-Unis où des dates de tournée sont prévus cette année. Cerise sur le gâteau, il produira même un titre pour Masta Ace. Sans surprise, l’album est un retour à cette fameuse période des années 90′. Il faut dire qu’à cette période, la vie en général était bien différente, forcément le rap l’était également. Le travail du beatmaker est tout bonnement remarquable, sur les six titres produits, il nous transporte dans ce qu’on appelle l’âge d’or du rap. On retrouve cette ambiance typique qui a marqué cette époque et toute une génération. Ce son rugueux, qui vient des bas-fonds, mais très lissé et peaufiné pour qu’on puisse hocher la tête sans penser à autre chose que la vibe. Notons que ce style est toujours d’actualité, surtout aux Pays-Bas avec des artistes tels que : EllMatic, MpDrees24, Blabbermouf, SQB, Christmaz… On reviendra dessus via un article dédié. Véritable volonté de maintenir l’héritage et les fondations sur pied ou artistes qui ne se reconnaissent pas dans le rap actuel, le débat est ouvert.
La seule certitude qu’on peut avoir, c’est que les instrus sont toutes de qualité. Et pour ceux et celles qui souhaitent s’exercer ou chiller tranquillement, les pistes instrumentales sont proposées avec. Véritable coup de maître réalisé par Snare, car c’est varié et on est loin de tomber dans le classique violon/piano. Les morceaux n’excèdent pas les 3 minutes 30, ce qui est suffisant pour les apprécier, les garder en tête et ne pas s’en lasser. Mention spéciale aux titres : « Kreuzlingen » et « Was Ist Los ».
Pour faire un bon album de rap, il ne suffit pas d’avoir des instrus de qualité. Il faut kicker ! Surtout qu’on nomme son EP « 1990 » et qu’on vient représenter cette époque. Classic Der Dicke enchaine les rimes et des flows toujours intéressants à suivre. Le rap allemand a pris une place considérable en Europe et ailleurs ces dernières années. En écoutant ce projet, on comprend pourquoi. Les morceaux sont variés et ne se ressemblent pas, il s’inscrit aisément dans les projets les plus intéressants de ce début d’année. On a même droit à un passage scratché sur un titre ! Histoire de bien respecter les disciplines du hip-hop. Il y a des artistes qui sont tellement imprégnés de cette culture qu’ils peuvent se permettre de dégainer quand ils veulent ; et toujours être au top. On va largement préférer un projet tous les 5 ans, mais bien travaillé qu’un album par an pour aucun hit. Le rap, on le pratique par passion et par amour, pas par opportunisme. Qualité allemande et précision suisse, une complémentarité sans équivoque.
Rédigé par Fathis