Véritable arlésienne du rap californien et de la côte Ouest, cet album n’a pas usurpé son nom. L’histoire commence en 1986, quand DJ Glaze et MNMsta forment une alliance et prennent le nom de Perfection. Ils vont rapper entre eux dans un premier temps, pour les potes, les soirées, dès que l’occasion se présente en fait. En 1989, le groupe décide de passer directement la quatrième vitesse en recrutant beaucoup de membres, on parle d’un total de 12 ! Forcément, c’est ingérable et il y a trop de complications, aussitôt recrutés, aussitôt disparus.
Il faut savoir que dans ses prestigieux membres, on retrouve le légendaire Domino (un article est en cours de rédaction.). Il était encore jeune à cette époque, mais maîtrisait déjà la production. Il a fini par quitter le crew et il s’est fait disser (clasher) sur le morceau « Let’ Em Understand Perfection ». Snoop Doggy Dogg rappe « Perfection is perfected so I’ma let ’em understand » dans « Nuthin’ But a « G » Thang » de Dr. Dre. Il est directement destiné à leur ancien collaborateur, le groupe se porte mieux sans lui d’après Doggy Dogg. Ce qui nous amène à la formation quasi-finale du groupe comprenant les fondateurs en plus de T-Dubb et Wayniac (membre du groupe Twinz et qui sont les cousins germains de Dubb). Ils rencontrent par la suite Suge Knight, le patron de Death Row ainsi que le patron du label Lockdown Records, Big Wes.
Le patron de Death Row ne les signe pas pour autant, c’est plutôt Big Wes qui s’intéresse à eux. C’est à ce moment-là qu’ils adoptent définitivement le nom Foesum (qui signifie quatuor). Entre-temps, le membre Travvy Trav est décédé, il demeurera comme le quatrième membre silencieux. Le groupe enregistre un album chez Solar Records, mais qui pour des raisons obscures ne verra jamais le jour. Cela n’arrange pas du tout les affaires du crew puisque durant un an environ, on entendra plus parler d’eux.
C’est lié à des différends avec leur ancienne maison de disques. Chacun voit midi à sa porte et Wayniac lui a vu Warren G. En 1992, le « G Child » a besoin d’aide pour l’écriture de son futur classique Regulate… G Funk Era. Wayniac, y voyant une grande opportunité, finit par quitter le groupe et forme The Twinz avec son frère Trip Locc. Le crew de Long Beach se retrouve donc à 3, en 1994, c’est à eux de voir midi à leur porte avec Eazy-E. Ce dernier les fait passer sur les ondes de Hot 92.3, une radio de Los Angeles, il signe ensuite chez Tommy Boy. Le succès commence avec les singles « Listen To The Sound » et « Lil Somethin’ Somethin' » qui sont publiés en 1995 suivis de l’album Perfection en 1996.
Vous trouverez d’excellentes chroniques sur le net et vous ne verrez que des retours positifs sur l’album. Comme beaucoup d’albums de son époque et de LBC, il est dans une pure vibe, celle de la G-Funk qui va redonner toutes ses lettres de noblesse à la ville. Ne vous méprenez pas, Dj Glaze est également un rappeur, presque le meilleur à mon sens. Ce sont de vrais kickeurs et ça fait la différence, ils n’ont pas le charisme d’un Doggy Dogg, mais les flows sont au point. Ils font bien plus que l’essentiel et proposent régulièrement des couplets travaillés et adapté à l’instrumental. On ne peut vraiment pas avoir un flow plus laid back comme sur le mythique « Listen To The Sound » qui rappelle beaucoup « Come Take A Ride » de Mad CJ Mac sorti un an plus tôt. Je considère ces deux morceaux comme la crème de la crème du genre, en termes de détente et de ride avec le coude à l’air, on fait difficilement mieux. Si cette fois, c’est le Dj qui assure le refrain pour un remarquable résultat, ils seront épaulés sur d’autres titres.
Citons l’emblématique Bo-Roc (The Dove Shack) qui apparaît de façon plus que remarqué sur « In The Wind » et « Runnin’ Game« , ce dernier connaîtra plusieurs remixes officiels. Que dire de « Whowouldofeveathought? » avec Nancy Fletcher (l’une des plus belles voix de la Californie) et Natasha Walker (beaucoup collaboré avec 2Pac entre autres). Concluons cette série de refrains succès avec une autre dame talentueuse, Aisha O’Dell qui est intervenu sur « Some Things Never Change« , « Come Take A Ride » ainsi que l’un des singles précédemment cités.
En matière de rap, on a également de quoi faire avec les frangins Wayniac et Trip Locc (qui forment le duo Twinz), A.L.T et O’Genius qui délivrent des couplets d’anthologies. En témoigne le mythique « Who Got Your Back » qui fait office de posse song avec 6 rappeurs, un refrain partagé par deux rappeurs et qu’on n’oubliera jamais. Pour la petite anecdote personnelle, j’avais vu le groupe à Lyon, forcément, ils ont interprété le morceau. La salle était petite, à la fin du morceau, tout s’arrête et on entend au fond « I got your motherfocking back » ! On se retourne tous, bien mort de rire et surtout surpris de voir que le morceau est autant suivi 20 ans plus tard.
C’est un sans-faute cet album, il est composé de deux interludes et de 12 titres. Le DJ du crew et Tony G ont quasiment tout produit et ils ne se sont pas trompés. Indispensable pour tout auditeur de hip-hop. La barre est très haute, la suite de leur carrière sera forcément en décalage de l’album. L’avantage de cet album et qui n’est pas des moindres, c’est qu’il est G-Funk. C’est fou à dire, mais de A à Z, il envoie du soleil, les albums qui suivent vont perdre petit à petit cela. Ce qui ne va pas non plus les aider, c’est qu’ils vont rester silencieux durant 6 longues années.
En effet, leur second essai « The Foefathers » sort seulement en 2002. Trop d’attente, on assiste à l’émergence du Sud, la côte Est reprend ses droits et la G-funk Era sombre petit à petit. Glaze est beaucoup moins assisté et produit l’album quasiment à lui seul, on retrouve donc cette touche chill et funky à la fois présente dans le premier album. Des titres comme : Hello, Think About It, Eastside Stories, Betcha She Don’t Love U… nous transportent aisément.
La pièce maîtresse demeure pour ma part « Hit This Lick » qui relate un braquage. C’est sombre, le synthé et la sirène se marient à la perfection. On est dans un autre registre, elle arrive dans la seconde partie de l’album, MNMsta pose deux couplets et un pour T-Dubb. Le premier fait tout l’étalage de son talent, notamment sa capacité à pouvoir changer de débit. C’est un titre qui m’avait traumatisé à la première écoute, j’avais adoré. Avec le recul, je le trouve toujours aussi bon, mais je relativise. Il faut remettre le morceau dans le contexte de son époque. Le reste de l’album ne doit pas être pour autant snobé, on peut noter des invités comme Kam, E-White (DPGC), Twinz, Kayzabro du groupe japonais DS455, Bo-Roc…
Toujours plus haut, le groupe crée son propre label « The Perfection Label« , logique. Ils rééditent leur premier album avec des bonus. Un premier greatest hits et « The Lost Tapez ». On peut y lire ceci :
"Cet enregistrement contient du matériel classique enregistré et remastérisé à partir de cassettes analogiques de faible qualité. Pour cette raison et en raison de la perte de génération normale, cet enregistrement ne doit pas être comparé à l'audio de la norme commerciale d'aujourd'hui. Cet album est dédié à la mémoire de Travvy Trav."
Foesum Tweet
Je peux également le confirmer, la qualité est très faible et c’est quasiment inaudible même pour un fan invétéré comme moi. L’album qui suit en 2005 se nommera « U Heard Of Us », il est très bon. Il possède son lot de classiques dont : Keep It On The LoLo, Hold On, The Way We Do, Till The Wheelz Fall Off…
Fredwreck, Xl Middleton et DJ Glaze se partagent la grande partie de la production. Côté invités, on retrouve Kam, E-White, Twinz…
C’est ensuite au tour du projet « The G-Mixes » de voir le jour en 2006, c’est principalement des remixes du DJ latino du groupe. C’est sympa. Le reste des sorties sur le label, ce sont des solos sur lesquelles je reviendrais, des rééditions et des best of. Il faudra avancer dans le temps, en 2010 exactement pour voir le nouvel album du crew : Loyalty And Respect. Il est sorti sur le label japonais Sony Records Int’l. Pourquoi je vous dis cela ? Car il y a des liens musicaux (et commerciaux) très fort entre les rappeurs américains qui viennent du côté du Pacifique avec le pays du Soleil Levant. Il faut savoir plusieurs choses sur ce pays, c’est le plus gros consommateur d’albums musicaux au format physique.
Il permet une bonne distribution des albums et donne une visibilité certaine à ces artistes. Les Japonais, bien que très conservateurs, sont friands de rap américain, notamment le style G-Funk. Beaucoup de groupes, de DJ’s, producteurs, promoteurs et autres se sont associés à des rappeurs californiens et sudistes. Ils s’exportent beaucoup dans le pays asiatique et invitent beaucoup de rappeurs étrangers sur des disques japonais. Il y a également une très forte diaspora asiatique en Californie.
Une grande génération de Japonais est influencée par le style de vie américain, pas le côté bling-bling mais le côté lowrider, bandanas et les fameux « khakis and chucks ». Comprenez par là, le style converse, dickies et chemise. Au final, le Japon est devenu une terre d’accueil, les artistes signent en général pour une distribution d’un ou plusieurs albums, mais n’y demeurent pas sur le long terme. Je pense que financièrement, ils doivent mieux s’y retrouver.
L’album L&R que j’ai cité est clairement dans une vibe G-Funk, pas celle qui est relaxante, celle pour danser plutôt. On y retrouve beaucoup de monde : Bo-Roc, Tasha, Fingazz, Wayniac, Two-J, Mc Eiht, OG Daddy V… Ce qui a par contre bougé et de façon définitive, c’est le départ de DJ Glaze, il n’y a pas d’infos sur cela, il ne va plus jamais collaborer avec son crew. Il n’est pas du tout présent sur cet album que je recommande tout de même. C’est peut-être le plus équilibré depuis leur masterpiece.
Après le départ de leur compère, ils ralentissent un peu la cadence, mais ne sont pas à l’arrêt pour autant. Viens pour moi l’incompréhension totale avec l’EP « Futuristic G’z » produit par Electric Weed. Le délire, vous l’aurez compris un mix d’électro/G-funk/rap, mais honnêtement ça ne prend pas du tout. Ils n’ont pas remis le couvert et tant mieux pour nos oreilles ! C’était sûrement un délire, mais totalement oubliable. N’ayant plus de producteur attitré et désireux de toucher d’autres publics, il se tourne vers l’incontournable producteur et DJ français : DJ AK basé sur Lyon.
C’est tout l’inverse de leur dernier projet, on tient pour moi leur second meilleur album. C’est une tuerie dans son intégralité, le lyonnais produit tout ! Par moments épaulés pour les drums, la basse, la guitare ou encore le saxophone, mais il assure tout le reste. C’est toute une équipe de production qui collabore pour livrer un tel diamant et pour couronner le tout, il est publié sur le label français Gangsta Zone Records. Citons par exemple « G-Funk Shun », « House Party », « It’s LBC », « Keep It Moving », « One Night », « Shine & Grind », « We Up In Here… »
Je peux tout citer et on arriverait à 12 hits totalement maîtrisés. Il y a eu peu de contribution hormis les couplets de T-Dubb & MNMsta, on y note juste le talkbox du DJ lyonnais, les apparitions de l’éternelle collaboratrice Tasha et la voix qui ne périt jamais Bo-Roc. Ils font un retour fracassant en 2014 et offrent un véritable spectacle de couleurs et de musiques à tous les fans. Si Perfection vous semble trop éloigné bien qu’il ne souffre d’aucune rayure, cet album vous comblera. Leur second meilleur album, le lyonnais a réalisé un travail de génie.
Toujours en 2014, ils proposent un nouvel album, de nouveau édité au Japon !
« Cali Life » est le titre, visiblement leur voyage en France leur a permis de faire connaissance avec un autre producteur : Sovan (Sicco-So-VIZZ). Un véritable virtuose en matière de production G-Funk en France au même titre qu’Aelpéacha ou Cartelsons (Cartel Productions), il produit 4 pistes pour les Californiens. Les Japonais se voient confier quasiment tout le reste de la production.
Pour les invités, on retrouve quasiment les mêmes, donc inutile de les citer. L’album est très bon, dans la lignée du précédent, plus ensoleillé et plus conventionnel. Il ne parvient pas à accrocher autant que le précédent, les deux albums étant sortis quasiment ensemble, on compare naturellement. Ce qui à mon sens à grandement desservi le second, bien qu’il soit très réussi. Tout ceci nous amène au dernier album de groupe « What Legends Are Made Of » en 2016. 20 ans plus tard avec deux membres en moins, la magie peut-elle encore opérer ? Je réponds oui.
On garde la même équipe pour les chants, car on ne change pas une équipe qui gagne, mais on peut la renforcer. Et comme le pardon est la plus belle des fleurs, on retrouve Domino sur l’excellent « Somethin 2 Ride 2. » Toujours dans la continuité de conquérir le monde, après avoir intégré des producteurs japonais, français, suisses… Au tour de RTN, le producteur polonais qui nous avait gratifiés en 2019 du mythique « Funktion » de venir mettre ses machines au service du peuple.
S’il doit en être ainsi, soit, plus d’album de ce groupe légendaire, on l’acceptera, car ils auront livré une véritable galette. Ce qui au final nous conduit à un quasi sans faute avec son lot de classiques G-Funk et West Coast que personne ne peut nier aujourd’hui. En 20 ans, ils se sont forgés un nom bien au-delà des rues de Long Beach City, ils demeureront encore longtemps dans les autoradios et dans les playlists de riders. Leur apport n’est pas négligeable et quand on voit leur parcours, on ne peut que former une haie d’honneur. Ils présentent une des discographies du style le plus fournies, les plus complémentaires et les plus riches.
Il leur a manqué juste un succès plus important via une meilleure diffusion pour toucher plus de monde. Il sera plus dur aujourd’hui de convaincre les néophytes tant les normes musicales ont changé, mais le talent ne se perd pas, il se reconnaît. Nul ne sait ce que serait devenue la formation si tous les membres originaux avaient continué l’aventure. Tout comme personne ne sait de quoi est fait l’avenir, donc en attendant, continuons de profiter de leur héritage en espérant un nouveau projet.
Ils sont peu nombreux et surtout pas vraiment intéressants, vous allez comprendre pourquoi. Pour DJ Glaze, on note « Ultimate Collaborations » en 2002 où il fait poser principalement son crew sur ses prods. Dans le genre compilation, on peut noter « Long Beach City Limits » sorti sur leur propre label, c’est le producteur L’s qui produit tout. On y retrouve Ras Kass, Blu, Daz Dillinger, Sly Boogy, Co$$ (Cashus King), Daz Dillinger, Techniec, XL Middleton, Foesum, Twinz, E-White…
Justement, parlons de ce dernier. Son appartenance au groupe n’est pas très claire en vrai, il est très proche et il a publié son album « 48 Hours : The White Album » sur le label du crew. Glaze a produit dessus, l’a enregistré et mixé. C’est d’ailleurs le meilleur projet du rappeur. Il est sorti en 2004. Il sortira un autre album intitulé « E-White Is Back » en 2009. On peut noter des singles et des EP’s à son actif.
Le plus prolifique des membres n’est autre que MNMsta avec au moins 3 albums solos à son actif entre 2004 et 2011. Malgré plusieurs tentatives pour convaincre et des invités de renom dans le genre, il n’arrivera pas à se démarquer. Aucun album n’a vraiment su retenir mon attention, je ne suis pas le seul fan qui est resté sur sa faim. Quant à T-Dubb, il n’a jamais rien proposé en solo, ce qui est fort dommage, car à mon sens, c’est le meilleur sur la durée. Ce qui ne remet en aucun cas, le talent des 4 artistes en cause, tous ont eu leur moment de gloire en feat ou avec leur formation.
Nous voilà complet pour le groupe, je les suis attentivement, je suis peut-être passé à côté de quelques sorties, mais sincèrement, je ne pense pas. Ainsi, inutile de vous attarder sur des projets peu intéressants et vous concentrez sur l’essentiel. Tout amateur de rap doit écouter leur premier album, tout fan de G-Funk, de son « West Coast » et de funky vibes doit jouer leurs albums.