HipHop sans frontières

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Le rap, une alternative à l'éducation nationale / Genocide - Srebrenica

Localisation : Hawkes Bay, Nouvelle-Zélande / Bosnie

Année : 2008

Introduction

Je l’ai souvent répété, le rap est un outil culturel, social et éducatif. J’insiste sur ce dernier point, déjà, je voudrais clarifier deux status : Rappeur et Mc. Je ne compte plus le nombre de fois où un texte à égayer ma curiosité…

– Rappeur : Personne pratiquant le rap. Ne le fait pas par amour, juste par intérêt, par opportunisme… Bien souvent, il ignore (ou ne l’applique pas) la devise même du Hip Hop « Peace, Love, Unity and Having fun ».

– Mc : Artiste qui écrit et interprète ses textes de rap. Fidèle a la devise du Hip Hop, il le fait par amour avant tout. Il concrétise ses projets. Il ne rêve pas d’argent, de filles facile et pas de grosses voitures. Il le fait juste par amour de l’art. Il y a une dimension culturelle, de transmission, de partage et d’élévation à travers son art.

Tout ceci, s’applique également à la gente féminine. N’ayez crainte mesdames, on ne vous oublie pas.

Bien, ceci correspond à ma propre définition et vision de cette magnifique culture. Il faut également reconnaître, qu’il y a évidemment plus de rappeurs que de Mc’s. Cette série de dossiers s’intéressera évidemment à ces derniers, ou au moins, le temps où ils ont pratiqué en tant que véritable artiste. L’autre chose que je répète souvent, c’est que j’ai appris beaucoup de choses avec le rap. Comme dit Bouddha, doute de tout, même de mes paroles. Dans cette musique, c’est le mot d’ordre. On trouve des artistes qui veulent vraiment transmettre leur savoir, leurs découvertes et offrent une autre vision du monde. Souvent plus cruelle mais assurément plus réelle. Soit on vit dans un mensonge permanent via des messages préconçus et réconfortants ; soit on voit la vérité avec toutes ces atrocités et ses cicatrices. En général, c’est dans le rap dit hardcore ou le boom bap qu’on trouve le plus de messages importants. En France, on dit plutôt du rap conscient. Le souci avec ce genre de rap, c’est que c’est parfois ennuyant ou lassant pour les non-initiés. C’est un tout qu’il faut savoir maîtrisé, ce n’est plus seulement de la poésie

Le génocide de Srebrenica (11-16 juillet 1995)

Point important pour mieux comprendre la particularité de la Bosnie-Herzégovine .

La Bosnie-Herzégovine est un pays peuplé par différents peuples. Possède une culture complexe et varié puisque la population est repartie ainsi : croates (catholiques), Serbes (orthodoxes) et les Bosniaques (Musulmans). Les Bosniens désignent TOUS les habitants du pays, les Bosniaques seulement les musulmans (plus vus comme une nationalité dans ce contexte). On peut dire que le pays est divisé en 3 régions autonomes, 3 présidents se succèdent pendant 8 ans et changent tous les 6 mois, je crois. Enfin, une partie des Serbes considère la totalité du pays comme une région serbe, tout simplement ! Sarajevo est la capitale et les Bosniaques, les musulmans donc sont majoritaires. Enfin, ils parlent tous la même langue, seul l’alphabet diffère.

 

Quelque 8.000 garçons et hommes ont été tués par les forces serbes de Bosnie lorsqu’elles ont envahi la ville de Srebrenica pendant une guerre régionale dans les Balkans en juillet 1995. Il s’agit de la plus grande atrocité commise sur le sol européen depuis la Seconde Guerre mondiale.

Des dizaines de milliers de Musulmans de Bosnie des environs, fuyant les attaques des forces serbes de Bosnie contre leurs propres villes et villages, ont cherché refuge à Srebrenica. Pendant trois ans, les forces serbes de Bosnie ont assiégé l’enclave et l’ont fréquemment bombardée. Elles contrôlaient les routes d’accès et entravaient l’acheminement de l’aide humanitaire internationale, notamment des vivres et des médicaments. La ville de Srebrenica était saturée de réfugiés. Les gens campaient dans les cages d’escalier et dans les couloirs d’immeubles à appartements, dans des voitures et dans des bâtiments publics comme l’école et le centre sportif, tandis que d’autres n’avaient pas du tout d’abris et se serraient les uns contre les autres dehors par des températures qui, en hiver, pouvaient descendre à -25ºC. La plupart de ceux qui avaient fui pour venir à Srebrenica n’avaient que peu de nourriture depuis qu’ils avaient quitté leurs villages, et la seule source d’eau, la rivière, était fortement polluée par des ordures, des excréments et des produits pétroliers.

En réponse à la détérioration rapide de la situation humanitaire, en avril 1993, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté la résolution 819 qui a fait de Srebrenica une « zone de sécurité ». Quelques jours plus tard a été signé un accord prévoyant un cessez-le-feu total à Srebrenica, la démilitarisation de l’enclave, le déploiement d’une compagnie de la FORPRONU (Force de Protection des Nations Unies) à Srebrenica, et l’ouverture d’un couloir entre Tuzla et Srebrenica pour l’évacuation des grands malades et des blessés graves. La FORPRONU a établi un petit poste de commandement dans Srebrenica même, et un quartier général plus grand, à cinq kilomètres environ au nord de la ville, à Potočari (la « base de l’ONU »). De ces bases, la FORPRONU a cherché à superviser la démilitarisation de la ville. Le premier groupe de soldats de la FORPRONU est arrivé en avril 1993, puis la relève des troupes s’est effectuée tous les six mois environ. Ils étaient dotés d’un armement léger et leur effectif n’a jamais dépassé 600 hommes. En janvier 1995, un bataillon néerlandais (le « DutchBat ») est arrivé. 

En mars 1995, Radovan Karadžić, Président et commandant suprême des forces armées de l’entité autoproclamée de Republika Srpska, a donné instruction aux forces serbes de Bosnie d’éliminer la population musulmane des enclaves de Srebrenica et de Žepa. La directive devenue connue sous le nom de « directive no 7 », a été précurseur des crimes commis en juillet 1995. Le corps de la Drina de l’Armée de la Republika Srpska (Vojska Republike Srpske, la « VRS ») a reçu l’ordre suivant :

“Par des actions de combat planifiées et bien conçues, créez une situation d’insécurité totale, ne laissant aucun espoir de survie ou de vie future aux habitants de Srebrenica et de Žepa.”

Source : https://www.irmct.org/specials/srebrenica/timeline/fr/

En 2009, environ 3 200 victimes y sont inhumées.

Le , le tribunal de La Haye estime que l’État néerlandais est civilement responsable de 300 morts à Srebrenica parce que les soldats néerlandais n’auraient pas dû évacuer ces hommes de la base où ils s’étaient réfugiés. Cette décision est potentiellement lourde de conséquences pour les missions de l’ONU.

En juin 2017, la Cour d’appel de La Haye a jugé les Pays-Bas partiellement responsables de la mort de 350 musulmans lors du massacre de Srebrenica.

Les Pays-Bas furent d’ailleurs jugés partiellement responsables car ils avaient fait le partage entre hommes et femmes, avant que les hommes ne soient fusillés et les femmes expulsées et refusé l’appui aérien de l’OTAN en raison des risques pour leurs troupes.

Certains membres éminents du parti grec d’extrême droite Aube dorée furent impliqués dans le massacre.

Ce crime est considéré comme le « pire massacre commis en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ». Il est qualifié de génocide par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et la Cour internationale de justice à plusieurs reprises. Le programme officiel de l’Éducation nationale en France use aussi de cette qualification. Celle-ci est cependant contestée par certains historiens spécialisés, ainsi que par beaucoup de Serbes.

Des experts onusiens considèrent que ce génocide appartient à une vaste campagne de « nettoyage ethnique » en Bosnie multiculturelle, mise en œuvre par les Serbes dans le but de créer un territoire « ethniquement pur » et le joindre à la Serbie. C’est le plan de création d’une « Grande Serbie », idéologie qui apparaît en 1844 (Ilija Garašanin) et qui est toujours actuelle.

Le 11 juillet de chaque année, des dizaines de milliers de personnes se retrouvent au mémorial de Potočari, créé en mémoire des victimes.

Le mémorial et cimetière de Srebrenica-Potočari a été inauguré le par Bill Clinton. Il se trouve sur l’ancienne base du bataillon néerlandais à Potočari.

Sur une pierre figure cette inscription :

In the Name of God The Most Merciful, the Most compassionate / Au Nom de Dieu, Le Très Miséricordieux, le Très Compatissant
We pray to almighty god / Nous prions Dieu tout-puissant
May grievance become hope ! / Que les griefs deviennent l'espoir !
May revenge become justice ! / Que la vengeance devienne la justice !
May mothers tears become prayers / Que les larmes des mères deviennent prières
That Srebrenica / Que Srebrenica
Never happens again / Ne se reproduise jamais
To no one and nowhere ! / Pour personne et nulle part !

Source : Wikipédia

L’ONU est considéré en partie comme responsable de ce massacre. Il leur est reproché d’être trop resté en retrait et ne pas s’être assez impliqué pour le conflit pour y mettre fin rapidement.

Je résume avec mes mots :

Pour faire court, Srebrenica est une ville située en Bosnie-Herzégovine, en juillet 1995, les Serbes ont commis un génocide contre les Musulmans. Le massacre de Srebrenica est considéré comme le « pire massacre commis en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. »

Le but de tout ça était un nettoyage ethnique, les Musulmans ne désignent pas ici la religion, mais la nationalité. En fait, les Bosniens avaient pour nationalité Musulman (qui étaient donc appelés Bosniaques). C’est ambigu, mais ça se passait comme ça. Les Serbes les ont donc massacrés. Le terme « Musulmans » désigne, dans les pays de l’ex-Yougoslavie, une nationalité de Slaves du Sud de tradition musulmane.

Genocide, itinéraire d'un MC Au front

Genocide, de son vrai nom Jusuf, est un rappeur bosniaque basé en Nouvelle-Zélande. Il est né en 1984 à Zvornik, en Bosnie, alors connue sous le nom de « Yougoslavie ». En 1992, la Yougoslavie a commencé à se désagréger lorsque les différentes provinces ont déclaré leur indépendance, ce qui a entraîné une guerre brutale qui a duré de 1992 à 1995 et qui a fait plus de 100 000 morts. À l’âge de 8 ans, la ville natale de Jusuf, Zvornik, a été l’une des premières à être attaquée et à faire l’objet d’un nettoyage ethnique par les forces paramilitaires serbes.

Il a assisté au pilonnage et au bombardement de sa ville, mais a réussi à s’enfuir avec sa famille. Après de nombreuses tentatives, ils ont finalement atteint Belgrade, qui était alors la capitale de l’ex-Yougoslavie. Avec sa mère et son frère, sans argent, ils sont montés dans un train à destination de l’Autriche. Dans l’une des cabines du train, ils ont rencontré un Serbe qui les a aidés à s’enfuir. Lorsque le chef de train est venu chercher des billets, l’homme serbe lui a dit que la mère de Jusuf était sa sœur et qu’ils avaient égaré leurs billets.

En Autriche, ils ont découvert que le père de Jusuf se trouvait dans un centre de réfugiés et la famille a de nouveau été réunie. Au centre de réfugiés, le gouvernement irlandais recherchait des réfugiés à emmener en Irlande et la famille de Jusuf a en a fait partie.

En Irlande, sa famille a commencé une nouvelle vie et s’est assimilée au mode de vie irlandais. C’est là que Jusuf a appris l’anglais et découvert sa passion pour le hip-hop. La vie de réfugié n’a jamais été facile. Au lycée, il commence à écrire sa propre musique sous le nom de « Genocide » et forme un groupe avec certains de ses amis. Après avoir terminé le lycée et à l’âge de 18 ans, il s’est rendu en Nouvelle-Zélande pour des vacances professionnelles et a décidé d’y rester après être tombé amoureux.

Pendant son séjour en Nouvelle-Zélande, Jusuf continue à travailler sur sa musique et sort une mixtape en 2005 intitulée « Rhymes Against Humanity », suivie en 2007 de « Tales From The Asylum ». Il commence à se faire remarquer par les Bosniaques vivant à l’étranger en raison du contenu de ses chansons, qui deviennent sa principale base de fans.

En 2008, il sort « The Psy-op Mixtape », qui contient des chansons avec le rappeur bosniaque « Frenkie« , le rappeur palestinien Mahmood du groupe DAM et un éventail de MC respectés de Nouvelle-Zélande et d’ailleurs. Cet album contient également la chanson classique sur le génocide « Srebrenica [Never Again] ».

En 2009, il a sorti « The Sacred Doctrine », sur lequel il a travaillé avec plusieurs rappeurs et producteurs.

En 2010, Jusuf est devenu membre d’un groupe appelé « Debt Collectors » avec les MC basés en Nouvelle-Zélande Tyson Tyler, GodMode et Sammy Gallows, le groupe a sorti leur mixtape « Escape from Arkham Asylum ».

C’est aussi à cette époque qu’il sort « The Dirty Bombs vol.1 Mixtape » avec son collaborateur de longue date DJ Trickalome. En 2011, Genocide et le producteur français « Junior Makhno » ont commencé à travailler sur un projet commun appelé « Classified Intelligence » en utilisant toutes leurs relations, ils ont réussi à obtenir des featuring de Vinnie Paz (Jedi Mind Tricks), Mareko (Deceptikonz), King David (Vendetta Kingz)…  Avec DJ Trickalome qui s’occupe de tous les scratches, ils ont sorti un album très acclamé en juillet 2011.

Cet album a été suivi en 2012 par « The Dirty Bombs Vol.2 Mixtape. »

En avril 2012, Genocide et son groupe « Debt Collectors » ont fait la première partie de KRS-One à Auckland devant une salle comble de 1 200 personnes. En 2013, Genocide a fait une tournée australienne avec Edo Maajka, Frenkie et DJ Soul, ils se sont produits à Sydney, Melbourne et Gold Coast. Il a ensuite commencé à travailler sur son nouvel album intitulé « The Burial Ground » qui est sorti en janvier 2015.

Depuis 2008, Genocide est apparu dans divers magazines et journaux et a figuré sur de nombreux albums internationaux. Il a également participé à l’émission « Neighborhood » de TVNZ, où il a parlé de sa vie et de la façon dont il la canalise dans sa musique.

En 2017, Genocide publie son nouvel album « Death Before Dishonor » .

Depuis cet album, il se fait très discret. Il prépare sûrement un album vu les indices laissés à droite à gauche, mais je ne peux rien affirmer. En revanche, je peux aisément dire qu’il est un excellent rappeur, son anglais est parfait. Aucun accent ou autre indice laissant témoigner que ce n’est pas sa langue maternelle. Je n’ai aucun souvenir d’un titre rappé en bosnien bien que certains rappeurs locaux l’ont accompagné sur ses albums. Son nom ne présente logiquement aucune confusion, il relate souvent des faits réels. Il parle de sa vie, de son vécu, de récits de guerre, de faits divers, de son pays natal, de ses origines… Son style est assez hardcore (dans le choix des prods) et boom bap. Ses textes sont directs, peu de grossièretés malgré son sombre parcours de vie.

Le meilleur projet à ce jour est pour ma part « Death Before Dishonor » avec des titres comme « Dear Motherland », « Dear Dad, » « Stop The Violence »… Un must have et le projet qu’il faut écouter en priorité. Peu importe votre style de rap, il vous parlera. Je place également « The Psy-Op Mixtape » et « The Burial Ground » dans le haut du panier. Je vous proposerai également une compilation de ses meilleurs morceaux ainsi que deux traductions de musique.

Son dossier a pour but de vous présenter le rappeur Genocide et bien évidemment mettre en lumière l’inoubliable date de Srebrenica. J’espère que tout comme moi, vous apprécirez cette musique et que vous avez appris quelque chose que l’école ne vous a pas enseigné. La suite dans le prochain article…

Rédigé par Fathis